Loi n°90/47 du 19 décembre 1990 relative à l’État d’Urgence.-

L’Assemblée Nationale a délibère et adopte ;

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

ARTICLE 1er .- L’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire national :

  • soit en cas d’événements présentant par leur nature et leur gravité le caractère de calamité publique ;
  • soit en cas de troubles portant gravement atteinte à l’ordre public ou à la sûreté de l’État ;
  • soit en cas d’agression venant de l’extérieur.

ARTICLE 2.– 1) L’état d’urgence est déclaré par décret.

2) Le décret instituant l’état d’urgence précise :

  • la ou les partie(s) du territoire soumise(s) à l’état d’urgence ;
  • la durée de celui-ci qui ne peut excéder trois mois ;
  • les autorités administratives habilitées à prendre les mesures consécutives à la proclamation de l’état d’urgence.

ARTICLE 3.- a) Nonobstant les dispositions de l’article 2, alinéa 2 ci-dessus, l’état d’urgence pourra être prorogé par décret pour une seule période de trois mois.

b) Si la situation qui a motivé l’état d’urgence persiste, l’Assemblée Nationale doit être

consultée.

ARTICLE 4.- L’état d’urgence prend fin :

  • soit automatiquement à l’expiration du délai fixé par le décret l’ayant institué ou prorogé ;
  • soit par décret, aussi bien au cours de la première période qu’au cours d’une période de prorogation, lorsque les circonstances ayant entraîné sa proclamation ont cessé.

ARTICLE 5.- Lorsque l’état d’urgence est déclaré sur une partie du territoire, les autorités administratives de ladite partie du territoire habilitées par le décret de proclamation peuvent, selon le cas et de plein droit, par arrêtés immédiatement exécutoires :

1) soumettre la circulation des personnes et des biens à des mesures restrictives et éventuellement à une autorisation administrative ;

2) ordonner la remise des armes, munitions, effets militaires d’habillement ou de campement et postes de radio émetteur-récepteurs, ainsi que faire procéder à leur recherche et à leur enlèvement ;

3) interdire toutes réunions et publications de nature à entretenir le désordre ;

4) instituer des zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est réglementé ;

5) requérir les autorités militaires pour participer en permanence au maintien de l’ordre dans les formes légales ;

6) autoriser, par tout officier de police judiciaire, civile ou militaire, des perquisitions à domicile de jour ou de nuit dans les formes légales ;

7) ordonner la garde à vue des individus jugés dangereux pour la sécurité publique dans les locaux, y compris dans un quartier spécial des établissements pénitentiaires, pendant une durée de 7 jours pour les Préfets et 15 jours pour les Gouverneurs. A l’expiration de ces détails, l’élargissement sera de droit si la mesure n’a pas été confirmée dans les conditions prévues à l’article 6, alinéa 6 ci-dessous.

ARTICLE 6.- Dès la proclamation de l’état d’urgence et pendant la durée de celui-ci, le Ministre chargé de l’Administration Territoriale peut, par arrêtés immédiatement exécutoires :

1) ordonner la fermeture, en tant que de besoin, des salles de spectacles, débits de boisson et lieux de réunion de toute nature ;

2) organiser le contrôle de la presse et des publications de toute nature, ainsi que celui des émissions audio-visuelles et des représentations théâtrales ou artistiques ;

3) ordonner la dispersion de tout groupement ou suspendre les associations qui provoquent des manifestations armées ou présentant par leur forme et leur organisation militaire ou paramilitaire le caractère de groupe de combat ou de milices privées, ou qui ont pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national, à l’unité, à la sécurité ou à la forme républicaine de l’État ;

4) autoriser la réquisition des personnes et des biens dans les formes légales ;

5) prononcer l’assignation à résidence, dans une circonscription territoriale ou localité déterminée, de tous individus résidant dans la zone soumise à l’état d’urgence qui s’avéreraient dangereux pour la sécurité publique.

L’autorité administrative devra, en cas de nécessité, prendre toutes dispositions utiles pour assurer la subsistance des personnes astreintes à résidence.

6) ordonner, soit de sa propre initiative, soit à la demande des autorités chargées de l’administration des circonscriptions soumises à l’état d’urgence, la garde à vue pour une durée de deux mois renouvelables une seule fois des individus jugés dangereux pour la sécurité publique.

ARTICLE 7.- Cessent d’avoir effet, en même temps que prend fin l’état d’urgence, les mesures administratives prises pour son application. Les armes et les effets visés à l’article 2, alinéa 2 sont restitués à leurs propriétaires.

ARTICLE 8.- les mesures prises en application des dispositions prévues aux articles 5 et 6 de la présente loi doivent être communiquées au Comité National des Droits de l’Homme et des Libertés.

ARTICLE 9.– Les modalités d’application de la présente loi seront, en tant que de besoin, fixées par voie réglementaire.

ARTICLE 10.– La présente loi abroge toutes dispositions antérieures, notamment l’ordonnance n°72-13 du 26 août 1972 relative à l’état d’urgence.

ARTICLE 11.- La présente loi sera enregistrée, publiée selon la procédure d’urgence, puis insérée au journal officiel en français et en anglais. /-

YAOUNDÉ, le 19 décembre 1990

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

(é) PAUL BIYA

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