QUELLES SONT LES PEINES EN MATIÈRE D’AVORTEMENT EN DROIT PÉNAL CAMEROUNAIS ?

L’avortement est puni par l’article 337 du code pénal camerounais qui dispose qu’ »

(1) est puni d’un emprisonnement de quinze (15) jours à un (01) an et d’une amende de cinq mille (5.000) à deux cent mille (200.000) francs ou de l’une de ces deux peines seulement, la femme qui se procure avortement à elle-même ou y consent.

(2) Est puni d’un emprisonnement de un (1) à cinq  (5) ans et d’une amende de cent mille (100.000) à deux millions (2.000.000) de francs, celui qui, même avec son consentement, procure l’avortement à une femme. 

(3) Les peines de l’alinéa 2 sont doublées : 

a) a  l’encontre de toute personne qui se livre habituellement à des avortements ;

b) a l’encontre d’une personne qui exerce une profession médicale ou en relation avec cette profession 

4) La fermeture du local professionnel et l’interdiction d’exercer la profession peuvent en outre être ordonnées dans les conditions prévues aux articles 34 et 36 du présent code”

Le code pénal ne définit pas l’avortement, Il faut sans doute se référer à la définition courante du terme qui renvoie a une “Interruption prématurée de la grossesse” qui peut être spontanée (cas de fausse couche due à une maladie ou sans cause connue) ou provoquée (comme dans le cas des interruptions médicales de grossesse [IMG] ou des interruptions volontaires de grossesse [IVG].). L’article 337 parle de la femme qui “se procure avortement“ à elle-même ou y consent et de celui qui, même avec son consentement, “procure l’avortement” à une femme, ces expressions laissent penser que ce qui est réprimé c’est l’Interruption Volontaire de la Grossesse.

avortement

Quoi qu’il en soit, la loi établit une distinction entre la peine encourue par la mère et celle applicable aux complices.

LA PEINE ENCOURUE PAR LA MÈRE EN CAS D’AVORTEMENT

L’article 337 alinéa 1 prévoit une peine d’ emprisonnement de quinze (15) jours à un (01) an et une amende de cinq mille (5.000) à deux cent mille (200.000) francs ou l’une de ces deux peines seulement pour la femme qui se procure avortement à elle-même ou y consent.

Deux hypothèses sont envisagées par la loi, celle ou la femme enceinte se procure l’avortement a elle même sans aucune aide extérieure et celle où elle se fait assister par une tierce personne complice. Dans tous les deux cas de figure sa responsabilité pénale est retenue c’est à dire qu’elle encourt la même peine qu’elle ait posé elle même l’acte ou qu’elle ait tout simplement donné son consentement pour l’exécution de l’acte. La mise en œuvre de cette responsabilité suppose l’existence de l’élément intentionnel prévu à l’article 74 alinéa 2 c’est à dire que la mère ait volontairement agi dans l’intention de faire expulser le fœtus avant le terme de la grossesse.

LA PEINE ENCOURUE PAR LES COMPLICES

Il est important de rappeler avant tout qu’aux termes de l’article 97 qu’ “(1) est complice d’une infraction qualifiée crime ou délit :

  1. celui qui provoque, de quelque manière que ce soit, la commission de l’infraction ou donne des instructions pour la commettre ;
  2. celui qui aide ou facilite la préparation ou la consommation de l’infraction ; 

(2) la tentative de complicité est considérée comme la complicité elle même”

L’alinéa 2 de l’article 337 punit les complices d’avortement, c’est à dire ceux qui le procurent à une femme, d’une peine d’emprisonnement de un (1) à cinq (5) ans et d’une amende de cent mille (100.000) à deux millions (2.000.000) de francs. La mise en œuvre de cette responsabilité suppose que ces derniers aient agi en connaissance de cause, en d’autres termes, ces personnes doivent avoir eu connaissance de la grossesse en posant les actes matériels d’expulsion du fœtus du ventre de la mère avant le terme de la grossesse.

La peine est doublée à l’encontre des personnes qui se livrent habituellement à de tels actes et de ceux qui exercent une profession médicale ou similaire. Dans ce dernier cas de figure, la fermeture du local professionnel et l’interdiction d’exercer peuvent être prononcées comme peines accessoires.

Le soucis de la protection de la vie humaine dès sa conception n’a pas fait perdre de vue certaines situations au législateur camerounais, c’est pourquoi la loi pénale camerounaise tolère l’avortement dans des cas bien précis.

LES AVORTEMENTS TOLÉRÉS 

Le code pénal camerounais tolère l’avortement dans certains cas bien énumérés par l’article 339, celui-ci dispose en effet que : “ (1) les dispositions des articles 337…ci dessus ne sont pas applicables si les faits sont accomplis par une personne habilitée et justifiés par la nécessité de sauver la mère d’un péril grave pour sa santé.

(2) En cas de grossesse résultant d’un viol, l’avortement médicalisé ne constitue pas une infraction s’il est effectué après attestation du Ministère public sur la matérialité des faits”. 

Deux cas sont énumérés par l’article 339 ci-dessus. Le premier cas est celui où l’avortement est justifié par la nécessité de sauver la mère d’un péril grave pour sa santé. Dans cette hypothèse l’article 339 alinéa 1 pose comme condition que l’avortement soit accompli par une personne habilité. On peut alors se poser la question de savoir quelles sont les personnes habilitées à réaliser des actes d’avortement. Il est évident que les personnes exerçant une profession médicale sont habilités à poser les actes d’avortement dans le cadre d’une Interruption Médicale de Grossesse mais qu’en est-il  des autres personnes énumérées à l’article 337 alinéa 3) b) ?

La deuxième hypothèse concerne les cas de grossesse résultant d’un viol. Dans ce cas de figure aussi le code pénal écarte l’infraction d’avortement à condition que la matérialité des faits soit établie par le Ministère public. La question qui peut se poser ici et celle de savoir si les faits de viol doivent être établis avant la réalisation des actes d’avortement ou a posteriori. L’avortement dont il est question en cas de viol doit dans tous les cas être un avortement médicalisé, cela signifie t-il que dans ce cas l’avortement non médicalisé est répréhensible même si la matérialité des faits venait à être établie ?

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